D.R. Le déploiement des contrats de relance et de transition écologique (CRTE) s’intensifie. A la date du 12 octobre 2021, 702 CRTE ont été signés ou sont sur le point de l’être (251 CRTE signés et 451 ont signé un protocole de préfiguration, préalable à la signature du CRTE dans les prochaines semaines).
« Une petite révolution » pour Jacqueline Gourault
Cet avancement a été salué par la ministre de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, Jacqueline Gourault, lors de la 31e convention nationale d’Intercommunalités de France-AdCF, le 14 octobre 2021 : « Les CRTE représentent une petite révolution dans la façon dont l’Etat entend travailler avec les communes et les intercommunalités. Je veux saluer la grande qualité des documents qui ont été produits et qui font du projet de territoire le socle des relations de travail entre l’Etat et les collectivités ».
Le CRTE : un contrat chapeau pour doper la relance
Un bilan positif partagé par les instances de l’AdCF. « Les CRTE sont un succès quantitatif et sont une première étape dans le changement culturel de l’Etat », s’est réjoui Sébastien Martin, le président de l’association d’élus. Il faut se rappeler que cette contractualisation des projets d’investissement des collectivités avec les préfets et sous-préfets sur les six ans du mandat municipal 2020-2026 était une demande historique de l’association des intercommunalités.
Néanmoins le président élu le 5 novembre 2020 pointe deux difficultés : le trop grand nombre d’appels à projets (70 rien que pour le Plan de relance selon Carole Delga, présidente de la région Occitanie et de Régions de France) et un besoin accru de relations interministérielles avec des financements pluriannuels. « Il faut que les autres ministères soient prêts à déconcentrer leurs moyens. Ce n’est pas mettre en danger les finances de l’Etat que de sacraliser pour trois ans son engagement en direction des territoires », avait-il insisté dans nos colonnes. Une critique entendue par la ministre qui a estimé qu’ »il faudra poser ce problème de la pluriannualité dès le début du futur mandat car cela donnerait une visibilité plus grande aux élus. » Une première étude de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) sur les 100 premiers CRTE signés met en évidence la variété des thématiques contenues dans ces contrats. Les élus intercommunaux se montrent particulièrement volontaristes en matière de rénovation des bâtiments publics, de traitement et de valorisation des déchets et de lutte contre l’artificialisation des sols.
L’agriculture est aussi un enjeu majeur, la crise sanitaire ayant révélé l’importance de la souveraineté alimentaire et du maintien du potentiel agricole local, tout en veillant à une utilisation économe des ressources. L’éducation au goût, la maîtrise du gaspillage alimentaire, la promotion des circuits-courts et du savoir-faire local figurent parmi les priorités d’action des élus. Les territoires mettent aussi l’accent sur l’écomobilité, qui passe par la construction d’infrastructures, le déploiement d’offres de transport collectif et de solutions de covoiturage.
Un sujet qui correspond pourtant peu aux compétences des intercos a toutefois émergé au niveau local avec la crise sanitaire : la santé. Selon l’ANCT, 36% de l’échantillon de CRTE contient un contrat local de santé (CLS). l’analyse note également que la moitié des CRTE étudiés intègre un volet interterritorial. Parmi les améliorations possibles, l’ANCT cible la conférence des maires qui pourrait davantage sollicité pour mieux associés les communes à cette contractualisation.
Sur le terrain, les avis sont plus contrastés comme l’a montré l’atelier « Contrats de relance et de transition écologique : les conditions d’une réussite » organisé lors de la convention de l’AdCF. Philippe Lemaire, directeur général des services de Sicoval considère que « ce contrat renverse les rapports avec les services de l’Etat qui sont dans l’accompagnement plutôt que dans le simple contrôle » alors que Renaud Averly, président de la Communauté du Pays Réthélois, voit « l’Etat comme le partenaire le moins fiable car il recycle beaucoup de crédits et ne prend aucun engagement sur la pluriannualité ».
Une diversité de contenus et des inquiétudes sur les financements
Selon les remontées d’information organisées par l’AdCF-Intercommunalités de France, il en ressort une diversité de contenus et de nombreuses interrogations d’une collectivité à l’autre. Là où certains CRTE tiennent en quelques pages, d’autres dépassent la centaine (sans comprendre les annexes financières ou les listes d’opérations).
Le CRTE du Grand Cognac, de 16 pages, est très recentré sur les seuls énoncés majeurs, alors que celui de la Charente Limousine dépasse les 80 pages. Dans les Hauts de France, celui de la communauté d’agglomération Lens-Liévin (CALL) représente plus de 70 pages avec des éléments de diagnostic, les principales orientations stratégiques et des plusieurs dizaines de fiches action. Le CRTE du pays du Grand Chalon, signé à l’échelle du SCOT, comprend 234 pages (sans ses annexes financières) et entre avec une très grande précision dans les enjeux territoriaux et les objectifs de politiques publiques. « Il n’y a pas de modèle. Certains se concentrent sur quelques projets structurants alors que d’autres y glissent tous leurs projets communaux et intercommunaux », résume Philippe Lemaire aussi vice-président de l’AdCF.
Relance : quels leviers pour les collectivités ?
L’autre enjeu est la question des financements. A Quimper, c’est l’absence de financements supplémentaires à l’exception des 350 millions d’euros annoncés dans le PLF 2022 qui questionne. « Il faut mettre tous nos projets même ceux des communes sans avoir la garantie d’avoir un sous de plus » regrette un des vice-présidents de l’interco. A Carcassonne Agglo, son président Régis Banquet s’inquiète de savoir s’il y aura toujours des financements hors des CRTE avec la DSIL et la DETR pour des petits dossiers. L’opacité des critères d’attribution de l’Etat est le fil rouge des prises de paroles de l’atelier.
Lors de son discours, Jacqueline Gourault a tenté de rassurer les élus et territoriaux. « il n’y a jamais eu autant d’argent disponible avec le plan de relance pour mener des projets », a-t-elle déclaré à la tribune en précisant que les 350 millions d’euros supplémentaires dans le budget 2022 étaient un reliquat de crédits non consommé. Crédits nouveaux ou crédits recyclés ? Pour Philippe Lemaire, l’objectif est surtout de consommer l’ensemble des crédits sinon « ils seront récupérés par Bercy ». Thèmes abordés Etat et collectivités locales Financements Finances locales